lundi 16 mars 2009

Les méthodes de datation en archéologie


Le carbone 14

La méthode de datation par le Carbone 14 a été découverte par Williard Frank Libby en 1947 (prix Nobel de chimie en 1969). Cela correspond au développement de la physique et à la mise en évidence de la présence de composés radioactifs.
Le Carbone 14 se trouve naturellement dans chaque élément organique ; en effet, les atomes de Carbone 14 s’oxydent en gaz carbonique et peuvent ainsi être intégrés dans les organismes vivants (intégration par photosynthèse, respiration ou nutrition). Quand un organisme meurt, sa production de stock de Carbone 14 s’arrête et le Carbone 14 se décompose en Carbone 12. Le reste de Carbone 14 contenu dans l’organisme se dégrade. La quantité diminue de moitié tous les 5570 ans (période radioactive). C’est pourquoi moins il en reste et plus on peut supposer que l’élément à dater est ancien. Par exemple, si l’on veut dater un os ; un os est composé de matières organiques et de minéraux. La matière organique est plus ou moins bien conservée. S’il manque du collagène, la technique de datation par le Carbone 14 ne marchera pas. Il faut 200 grammes d’os avec collagène pour faire une bonne analyse.
Pour les éléments comme le bois, la teneur en Carbone 14 est facilement évaluée ; c’est beaucoup moins évident pour des éléments tels que le calcaire ou les coquillages.
Comment connaître la quantité de départ de Carbone 14 ? On considère que la quantité actuelle de collagène dans un os d’aujourd’hui est la même que pour les temps passés. Cette constance est fausse. En fait, la teneur en Carbone 14 fluctue au cours du temps (relations avec le rayonnement solaire et le champ magnétique terrestre). C’est pourquoi est mis en place un système de calibrations. Le résultat trouvé correspondra à la date de mort de l’organisme étudié.
Si l’échantillon est gros, on mesure la quantité de Carbone 14 par compteur. S’il est petit, on fait une spectrométrie de masse grâce à un accélérateur de particules.
Pour les périodes très anciennes, la méthode Carbone 14 est inutile car ce dernier est totalement désintégré ; on peut ainsi remonter à 45000 ans (paléolithique moyen). C’est seulement à partir du paléolithique supérieur que la marge d’erreur se réduit. Les années radiocarbones sont indiquées en années B.P. (= Before Present), l’année de référence étant 1950.


L’archéomagnétisme


Cette méthode consiste à étudier la variation du champ magnétique terrestre observée dans les minéraux magnétiques présents dans l’argile. Tout comme pour la dendrochronologie qui nécessite l’établissement d’une courbe de référence étant donné les influences climatiques et géographiques pesant sur les éléments, cette technique nécessite l’établissement d’une courbe de référence pour chaque site étudié.
C’est la cuisson de l’argile qui permet d’enregistrer le champ magnétique environnant ; c’est pourquoi cette technique est principalement utilisée pour dater des éléments en rapport avec les céramiques, fours, tuiles, poteries etc. S’il n’y a pas d’élément perturbateur autour de l’élément à dater (tel qu’un élément métallique), le champ de l’objet est proche du champ terrestre ; des méthodes de mesure permettent alors de retrouver ce champ.


La thermoluminescence


Cette technique est principalement établie pour la datation des céramiques. Elle réside dans la constatation du fait que certains cristaux, et notamment le zircon, le feldspath et le quartz, accumulent au cours du temps l’irradiation naturelle et cosmique de leur environnement.
On va exposer un échantillon à une forte température et mesurer la lumière émise, proportionnelle au temps écoulé entre la date de cuisson et la date de mesure.
Cette technique a des limites ; on ne peut remonter qu’à 700000 ans ; de plus, si l’échantillon a été exposé avant la mesure à une haute température, les données seront faussées.


La dendrochronologie


Cette méthode inspirée de la botanique a été inventée à la fin du XIXème siècle par l’Américain Douglas. La dendrochronologie est l’établissement d’une datation en fonction des cernes de croissance des arbres. En effet, les arbres, entre le cœur de leur tronc et l’aubier (couche sous l’écorce) développent chaque année un cerne de croissance, facilement identifiable lors de l’observation d’une section de tronc (en fonction de l’espèce d’arbre et du climat environnant ; l’étude du pin, du frêne et du mélèze est plus aisée). Un an correspond concrètement à l’association d’une zone claire et d’un cercle foncé. En général, les espaces entre chaque cerne sont très réduits dans les années de sécheresse, l’arbre ayant puisé dans ses réserves pour subsister mais n’ayant pas eu de quoi grossir.
L’analyse des cernes du bois va permettre d’établir des courbes de référence sur lesquelles on va s’appuyer pour comparer différentes carottes prélevées dans d’anciens objets (poutre de construction d’un navire médiéval par exemple). Il faut un minimum de cernes pour dater avec plus de sécurité, et de préférence du bois humide ou sec. On ne peut comparer que des arbres de même essence et ayant les mêmes conditions climatiques et géologiques de développement, car ces paramètres influent sur la croissance de l’arbre. Pour établir les courbes de référence, on va collecter des bois de plus en plus vieux qui se relayent dans le temps ; si on étudie des arbres ayant des années en commun, on peut ainsi superposer les courbes.
L’analyse dendrochronologique va aboutir à une date correspondant à la date d’abattage de l’arbre. L’un des inconvénients majeurs de cette technique est qu’on ne parvient pas à remonter loin dans le temps. Dans la région du Rhin, nous avons 7000 ans de dendrochronologie appliquée au chêne.


La stratigraphie


Chaque période archéologique correspond à une couche géologique. La succession des civilisations se retrouve dans l’analyse des couches stratigraphiques. De plus, le dépôt de sédiments, l’érosion des roches etc, ramène perpétuellement de nouvelles terres au sol. Les sédiments archéologiques sont de couleur et de structures différentes et il faut pouvoir saisir la nature de chaque dépôt. Les couches sont rarement séparées de couleurs tranchées. Le mobilier archéologique tel que des tessons de céramique permet de distinguer les couches. La granulométrie (structure de la terre qui entoure la couche) également.
L’homme peut apporter des sédiments quand il construit. Lors d’une réoccupation, on nivelle les structures anciennes déjà mises en place. Les tell sont des sites d’habitat occupés très longtemps et petit à petit, une colline artificielle s’est formée avec l’arrivée de nouveaux remblais. Il est important de distinguer une destruction accidentelle d’une destruction planifiée. Dans une destruction accidentelle, les objets sont détruits et abandonnés dans la couche, alors que dans une destruction planifiée, les objets sont scrupuleusement enlevés.
Des lignes noires peuvent aussi correspondre à un grand incendie. Les structures en creux sont les mieux conservées. Au contraire, les élévations disparaissent rapidement. Attention cependant ; si un trou a été creusé dans les anciennes couches à une période donnée, l’ordre des couches a pu être dérangé, et cela perturbe ainsi notre connaissance du lieu exploré.


La typologie


Pour l’identification des périodes, l’étude matérielle peut aider à fixer une date approximative d’un élément. On entend par étude matérielle l’étude des outils, constructions et productions humaines. Sur un édifice médiéval par exemple, la technique architecturale employée (agencement des pierres, technique de taille de la pierre, style et formes etc) va permettre d’établir une datation approximative de la période de construction de l’édifice.
De même, une comparaison des styles entre des céramiques par exemple va permettre de les rattacher à une civilisation précise.


Les sources écrites


L’étude des sources écrites est une des méthodes les plus anciennes et les plus « naturelles » que les chercheurs aient pu utiliser. Elle est surtout utilisée en histoire, beaucoup plus qu’en archéologie. L’archéologie a tendance à porter plus de crédit sur l’étude matérielle dans le sens étude des objets, de l’environnement, alors que les écrits peuvent être interprétés à mauvais escient, et comporter des erreurs. Les sources écrites doivent être manipulées avec beaucoup de recul ; une seule source écrite isolée ne peut constituer une preuve irréfutable.



Noëmie Chaudron