mardi 24 février 2009

Le village médiéval de Salives (21)



          Ce petit village du Nord de la Côte d’Or recèle bien des trésors mal connus du grand public : donjon du XIème siècle, puits du XIIIème siècle, église avec maintes œuvres d’art, calvaire du XVIIème siècle, colombier de 1789, maison de templiers, remparts médiévaux encerclant le bourg et enfin lavoir de 1842 ! Et chacun de ces éléments est un véritable délice à découvrir.

          Nous partons du donjon du XIème siècle ; le terme ici est approprié, un donjon signifiant une forteresse d’un bloc, à ne pas confondre avec les tours maîtresses, les tours les plus hautes des châteaux forts que l’on appelle donjon par mégarde ! Ce superbe donjon massif a malheureusement perdu la moitié de son espace par un effondrement en 1986, qui n’a heureusement causé que des dégâts matériels. Cela dit, la destruction a permis de mettre au jour un écorché très intéressant pour identifier la structure interne du donjon et déceler qu’il avait été construit par une technique d’armature de bois. Nous discernons en effet des trous carrés dans l’épaisseur des murs qui indiquent que les ouvriers avaient déjà fabriqué une armature de bois sur laquelle ils ont pu monter les pierres une à une pour construire le donjon. Ce fait n’est pas le seul aspect surprenant. On remarque également que ce donjon qui fait environ 18 mètres de haut ne comporte qu’une porte en hauteur, correspondant au deuxième étage ! L’accès à l’espace habitable devait donc certainement se faire par échelles, et on suppose que les deux niveaux inférieurs constituaient des espaces de vivres. Cette curiosité reste à approfondir.

détail trous de boulin armatures en bois donjon XIème.JPG

donjon XIème.JPG


tympans templiers chapelle.JPG           Poursuivons avec l’église Saint-Martin ; la façade à l’entrée propose des éléments typiques des signes templiers, à savoir une baie géminée reposant sur des visages de chouettes, ainsi qu’un tympan tréflé avec une rose à 5 pétales, symbolisant les vertus de connaissance et de fraternité propres aux Templiers. Il convient de signaler que l’église est orientée, permettant à un rai de lumière de pénétrer l’allée centrale de l’édifice pendant le solstice d’été.

L’intérieur nous réserve de belles surprises, pas pour l’architecture qui n’a rien d’exceptionnel, mais par quelques œuvres d’art. La grille cloisonnant l’autel date du XVIIIème siècle et se trouve classée en raison des médaillons en bronze représentant les outils de la Passion du Christ qu’elle arbore. Cela rappelle la croix de rogations établie derrière le presbytère ; cette croix est un pur chef d’œuvre du XVIIème siècle sculptée de tous les instruments de la Passion : le marteau et la tenaille, l’échelle, les fouets, l’éponge, la cruche, la lance, etc.



          Surtout, observons la statuaire ; des culs de lampe dans la chapelle XVème montrent des personnages guerriers évoquant les croisades (guerrier oriental et guerrier occidental). Ils côtoient divers saints, dont un précieux Saint Roch en pierre polychrome du XIVème siècle, qui conserve bien ses couleurs, et qui a un bouton pesteux sur le corps, Saint Roch protégeant les pesteux. Mais surtout, au milieu d’autres statues, il faut s’attarder sur le Christ aux liens, l’Ecce homo du XVème siècle en pierre polychrome également, exceptionnel par les détails de finesse de la sculpture, qui présentent des veines, des ongles, et font paraître les cordes qui enserrent le Christ réelles. Par sa splendeur, cette statue a fait partie d’une exposition au Musée des Beaux-Arts de Dijon mettant en avant les Christ aux liens de la région. Enfin, le chœur de l’église expose fièrement un Christ de résurrection étonnamment vivant posé sur une croix ! Cela symbolise de manière assez originale la victoire de la vie sur la mort.



armes de la Passion grille de l'autel chapelle.JPG



          A côté de l’église, à droite, se trouve une tour à l’histoire peu commune ; cette tourelle carrée du XIVème siècle qui présente un four à l’entrée protégeait un puits insoupçonné jusqu’en 1997, date où l’on a fait la découverte de ce puits naturel creusé à 17m de profondeur ! Le plus étonnant est de constater que cette tourelle d’angle a été édifiée uniquement dans le but de protéger la source sacrée, pour mettre une armature de pierre autour de l’eau, élément primordial pour assurer la survie de la population en temps de guerre. Preuve de cette fonction protectrice : à la base de la tour on constate que des meurtrières sont percées dans les murs.


croix XVIIème.JPG



lavoir XIXème.JPG           En poursuivant dans le village, nous arrivons auprès du lavoir ; beaucoup plus récent, édifié en 1842, mais riche de ses surprises aussi. Déjà, il faut savoir que l’alimentation en eau vient de la source sacrée qui aurait donné son nom au village. La légende raconte que cette eau aurait le pouvoir de conserver la jeunesse. Aujourd’hui, on peut voir une sorte de grotte percée vers le centre du lavoir, avec une mare de la source, et des bijoux scintillants posés sur les parois de la grotte. A la base, ce dispositif qui pouvait s’allumer, permettait de refléter le scintillement des bijoux dans l’eau et de donner un effet de profondeur. Malheureusement le système est détraqué et personne n’est pour l’instant en mesure de réparer le système informatique qui permettait d’enchanter petits et grands. Reste que le lavoir en lui-même est particulièrement joli, et doté d’une surprise : une cheminée au centre, installée par les hommes pour permettre aux lavandières de faire bouillir l’eau au lavoir, sur place, pour éviter d’avoir trop froid et de devoir amener elles-mêmes des bassines d’eau chaude !

          Pas très loin, nous apercevons la maison dite des Templiers. Trop petite pour être une commanderie mais qui comporte quelques insignes templiers, à savoir une baie géminée avec têtes d’aigles et des marques de tacheron en forme de croix. Une particularité : une étonnante évacuation de cheminée ronde coiffe le toit.



colombier 1789 avec ravière.JPG           Toujours aussi surprenante, l’histoire du colombier. Il a été édifié en mai 1789, d’où le manque d’odeur en pénétrant à l’intérieur ; en effet, les privilèges nobles ayant été abolis en août 1789, il n’a jamais servi ! Le colombier contenait plus de 1000 cases, inutiles… Nous remarquerons une ravière formant une couronne de pierre incurvée autour de la tour pour empêcher les rats de grimper au sommet et d’accéder aux intérieurs.

          Pour terminer, on peut admirer les remparts, d’une longueur totale de 1.4 kms. Ils datent du XIIIème siècle et ont été remaniés au XVème. Il subsiste des remparts partiellement détruits par des coulées de boue, d’autres reconstruits suite à des destructions humaines (accident de tracteur…), d’autres d’origine. A noter : des larmiers sur les tours des remparts permettaient de faire ricocher l’eau et de ne pas abîmer les fondations en pierre.

          En guise de conclusion, ce village constitue une base de balade extrêmement agréable, ponctuée de surprises toutes plus étonnantes les unes que les autres, et une ambiance particulièrement champêtre se dégage de l’ensemble.





Noëmie Chaudron