dimanche 22 février 2009

Le village médiéval abandonné de Dramelay (39)


          Au détour d’un chemin de randonnée escarpé, un parmi tant d’autres au cœur du Jura, se dressent les ruines du village de Dramelay-le-Château, un village médiéval (les substructions restantes en ont la teneur) dont la dernière maison fut incendiée par l’invasion allemande le 17 mai 1944. Les témoignages oraux des anciens sont là pour le prouver.

Pour le reste, il faut s’attaquer aux archives et les panonceaux destinés aux visiteurs apportent quelques informations. Outre un plan évasif des structures mises à jour, dénombrant telles habitations, tels puits encore visibles, nous apprenons que le village existait déjà au XIVème siècle, et qu’il fut rasé en 1479 par les armées de Louis XI. Il était également fortifié de murailles percées de deux portes (à priori, plus des enceintes d’identification du bourg que des enceintes impressionnantes, pour que le village soit si facilement attaqué). Il en subsista un simple bourg de quelques habitations rebaptisé Dramelay-le-Châtel, le château quant à lui ayant été rasé lors des attaques. Pour les férus de généalogie, il apparaît le nom des familles Dramelay bien sûr, mais aussi Viremont, Bussy, Légna, Chassal, Charnod.

En 1850, le village était un hameau agricole et artisanal qui comptait encore une cinquantaine d’habitants.

          Il demeure de ces ruines une chapelle encore en bon état de conservation. La nef et le toit ont en effet subi des réfections en 1980. Elle aurait été édifiée sous la commande d’Amédée de Dramelay, au XIIIème siècle. On remarque la toiture du porche couverte de pierres naturelles, ou lauzes, particularité typique de ces régions (cf halles médiévales de Nolay, halle des Pressoirs des Ducs de Bourgogne, en Côte d’Or) . Ces pierres calcaires très lourdes (800 kgs au mètre carré) ont des caractéristiques d’isolation et de résistance aux intempéries.

Les moellons de pierre constituant les murs d ‘élévation dénotent la modestie de cet édifice, simple paroisse de village. Il est intéressant de noter que le clocheton a probablement été rajouté au XXème siècle, à voir l’aspect grossier des pierres, également plus grisâtres et posées à la manière d’une maison moderne.

Les contreforts de l’arrière de la chapelle semblent bien plus anciens, et c’est cette partie de l’édifice qui doit dater du XIIIème siècle.





          Un peu plus loin en progressant, nous atteignons les ruines du donjon du château de Dramelay. Les Dramelay sont une riche famille ayant possédé 34 châteaux en Franche Comté.


Voici une reproduction du blason de cette famille. Le premier empiècement est de gueules à bande d’or, chargée au canton dextre (à gauche) d’une étoile d’azur, pour Chalon-Arlay. Le deuxième est d’or à trois tourteaux de gueules, pour Couternay. Le troisième est d’or au chef de gueules, pour Dramelay . Le quatrième est de gueules à bande d’or, chargée au canton dextre d’un tourteau d’azur, pour Chalon-Chatel-Belin. Le tout était chargé en abîme de gueules à la bande d’or, pour Chalon-Auxerre.


Cet édifice est sous la protection de l’ADAPEMONT, Association pour le Développement et l’Aménagement de la Petite Montagne, qui a entrepris dès 1992 des démarches, notamment envers les propriétaires, afin de restaurer ce qui pouvait l’être. Il ne reste donc du château que la tour maîtresse, partie la plus imprenable, qui date du XIIIème siècle (avec pour seigneur du fief Rodolphe de Courtenay).

L’épaisseur des murs est estimée à 2.20 mètres ; cette dimension qui nous semble impressionnante est un lieu commun pour les édifices militaires médiévaux. Cette épaisseur permettait à d’éventuels tirs d’attaque de ricocher contre la paroi sans endommager l’édifice, ou du moins sans l’écrouler.

Le socle de la base quant à lui fait 10.24 mètres. Il subsiste 4 niveaux d’élévation. Le niveau le plus bas servait probablement au stockage de denrées nécessitant d’être conservées dans la fraîcheur. Le niveau du rez-de-chaussée constituait un lieu de passage avec porte. Le niveau II était accessible par échelle de bois et devait abriter les lieux de vie. Le dernier niveau proposait une vue sur la vallée. Des archères attestent de la datation de l’édifice (les canonnières étant bien plus récentes) et de sa fonction militaire.

Il convient de remarquer d’une part la finesse de construction en moellons calcaires bien agencés, d’autre part les trous de boulin persistant à l’angle des murs. Les trous de boulin sont les ouvertures carrées qui permettaient lors de la construction d’insérer des échafaudages en bois pour pouvoir monter le mur au fur et à mesure . Ils peuvent aussi attester de percées permettant de recevoir des plafonds ou poutres en bois à l’intérieur de l’édifice.

Sur l’écorché de la photo ci-dessous, l’épaisseur des murs apparaît clairement. Les fondations sont en excellent état de conservation, comme souvent.

          Un sentier du patrimoine a été ouvert aux visiteurs afin de randonner tout en se cultivant, et le site a été sécurisé à cause des risques d’éboulis. Cependant, les restaurations ne sont pas évidentes à appliquer, faute de moyens.










Noëmie CHAUDRON