mardi 24 février 2009

Château-Vilain (39)


Il existe à proximité de Champagnole un lieu qui, malgré son nom, séduira les amoureux des vieilles pierres : Château-Vilain.



Château-Vilain à l'heure actuelle :




Au XII siècle, Simon de Commercy, seigneur de Mont-Rivel, fit construire une forteresse au sommet d’une montagne située à l’est de Bourg de Sirod. Il la baptisa du nom d’un bourg situé dans le diocèse de Langres, dont son père était le seigneur : castrum villanum ou rusticum. Ainsi naquit Château-Vilain.


Dominant tout le pays alentour, la forteresse affichait des dimensions respectables :220 mètres par 60 mètres.

L’auteur Jean-Baptiste Munier, dans ses Recherches historiques sur les Foncines , la décrivit comme suit : « Cette forteresse était entourée d'un mur d'enceinte construit sur les bords du rocher. On ne pouvait y pénétrer que par le côté sud qui communiquait avec le Bourg-Dessus. L'entrée était précédée d'une belle avenue de tilleuls, dont huit se voient encore, et défendue par deux tours quadrangulaires adossées à un donjon : l'une avait 4 mètres 50 de largeur et l'autre 9 mètres . C’est sous cette dernière qui servait de salle des gardes qu'était pratiquée la porte d'entrée; après avoir traversé cette porte, on rencontrait un chemin de 6 mètres de largeur et long de 33 mètres , bordé d'épaisses murailles, conduisant à une première cour qui renfermait un manoir fortifié.

Derrière ce bâtiment était une cour de 20 mètres de largeur, puis un donjon carré de 20 mètres de côté. Derrière le donjon se trouvait une autre cour de 80 mètres de longueur sur 60 de largeur. Le mur d'enceinte, flanqué de tours, complétait sa défense. Le premier bâtiment d'habitation était séparé de la cour renfermant le donjon principal par une muraille très haute et très épaisse, munie à ses extrémités de deux tours percées de meurtrières »

Détruite vers 1479 par les troupes de Louis XI, la forteresse fut relevée par la famille de Watteville.

Hélas, elle fut à nouveau démolie entre 1808 et 1810 pour reconstruire les usines de Bourg de Sirod, incendiées en 1803. Depuis lors, ce qui reste de la forteresse est laissé à l’abandon, ce
qu’on ne peut que déplorer.

net contraste entre la forteresse fin XVI ème siècle et la forteresse aujourd'hui





De la forteresse ne reste donc aujourd’hui que quelques ruines qui tendent à être envahies par les ronces. Cependant, Château-Vilain continue aujourd’hui d’exister à travers les drames et légendes qui sont les siens.


Oyez pour preuve l’histoire de la tour de Vienne.

Vers 1350, le seigneur de château vilain, Hugues de Chalons, entra en conflit avec son beau-frère, Guy de vienne. Ce dernier avait en effet eut l’audace de léguer la terre de chevreau à la femme du duc Philippe, alors qu’elle devait revenir à la comtesse de Chalons.

Un jour, il décida donc de s’emparer par surprise de guy, et de le faire prisonnier à château vilain. Il l’y retint durant un an, ne le sortant de son cachot que pour le menacer de mort s’il ne rétractait pas sa donation. A cette occasion, le pauvre Guy était suspendu par les pieds au sommet de l’une des tours. Hugues de Chalons le faisait tournoyer au dessus du vide à l’aide d’une corde, qu’il menaçait de couper à chaque instant.

Cette tour, dont des vestiges subsistent encore, fut dès lors appelée la tour de vienne.



Rappelle également l’existence de Château-Vilain la légende des trois commères.

On murmure que jadis, un maître de Château-vilain avait trois filles en âge de se marier. Comme le voulait la coutume, il recevait donc chaque dimanche un jeune homme du voisinage, espérant que l’une de ses filles le choisisse comme époux.




Mais les prétendants, bien que nobles, riches, hauts placés, n’étaient jamais assez dignes des demoiselles. Toujours elles les trouvaient trop grands, trop petits, trop gros, trop laids, négligés, sans éducation…


Désespéré, il vint un jour où le châtelain se plaignit à une fée. Mais celle-ci, qui suivait secrètement chaque entrevue puis entendait les critiques des méchantes sœurs, avait depuis longtemps compris que leur cœur était aussi dur et froid que la pierre. Aussi, elle choisit de les punir plutôt que de leur chercher un époux. D’un coup de baguette magique, elle les changea en trois statues de pierre, qui furent aussitôt appelées « les Commères ». Elles ont depuis lors tout le temps de continuer à proférer des méchancetés sur leurs prétendants.

Au fil des années, deux d’entre elles se sont écroulées. Seule subsiste aujourd’hui la plus jeune ( voir ci-contre).



A proximité de la forteresse, le promeneur aura également pu observer les ruines du village de Bourg-Dessus. Il était jadis enserré de murailles et fermé à ses extrémités par deux portes, dont l’une, datée du XVI siècle, existe encore.

Cette porte prend la forme d’une tour carrée, percée d’une arcade permettant le passage vers le « village ». Le voyageur d’antan l’empruntait pour gagner le val de Sirod et les montagnes suisses, de même que les convois cheminant sur la voie du sel. Tous payaient à cette occasion un droit de passage au seigneur.

La porte, contrairement à la forteresse de Château-Vilain, a eu la chance de bénéficier d’une récente réfaction. Celle-ci a notamment été possible grâce aux subventions versées par le département et par la fondation du patrimoine, sans oublier les dons des particuliers !


ancienne porte à péage de Château-Vilain

La porte avant et après la réfection




Marie Manzoni